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Se (ré)chauffer au bureau par le design

Prix de l’énergie qui s’envolent, changements de température de plus en plus extrêmes et fluctuants, bouleversements climatiques qui nous guettent de toute part… Face à ce flot d’informations, maintenir notre attention, éviter la surchauffe semble bien complexe. Au sein de cet article, nous proposons de modifier le champ de perception, de changer d’échelle pour s’intéresser aux possibles apports de l’architecture intérieure en termes de réflexions et de solutions pratiques, quant au confort thermique et à la déperdition énergétique de nos bâtiments. Ambiances, atmosphères, perceptions, effusivité appliquées aux espaces de travail, sont au programme de cette lecture.

Introduction

Isoler nos bâtiments ! Tel est le mot d’ordre souvent brandi comme la solution suprême pour éviter la déperdition énergétique, tout en subvenant au confort thermique de nos habitations. Pourtant, si l’isolation thermique a fait ses preuves dans la construction neuve, il en va autrement en ce qui concerne nos anciens appartements, nos anciens logis, nos anciens immeubles. Le chercheur en low-tech Kris De Decker a souligné, par exemple et à juste titre, qu’en “se reposant seulement sur l’isolation, l’énergie solaire et l’architecture bioclimatique, il nous faudra beaucoup trop de temps pour solutionner la problématique de la consommation énergétique des bâtiments”. Les miraculeuses solutions technologiques qui peuplent nos imaginaires, ne sauraient donc, nous priver de penser à d’autres manières de pallier les pertes énergétiques du bâti existant. Contre l’idée d’une reconstruction totale de notre parc immobilier -qui plus est, semble absurde-, d’autres solutions méritent d’être révélées, voire relevées tant la plupart sont déjà soutenues de plus ou moins longue date par divers acteurs. 

Une brève relecture de l’histoire des techniques s’impose donc. Celle-ci montre que de nombreuses solutions techniques comme celles, dans le cas de notre sujet, permettant de se réchauffer/rafraîchir tout en évitant les déperditions énergétiques, ont surgi ou ont existé en de mêmes périodes. L’architecture bioclimatique, avec ses préceptes de construction à partir du climat, a par exemple émergé au cours de la première moitié du XXe siècle, tout comme la climatisation moderne. Si cette première -l’architecture bioclimatique- fut portée par des penseurs et architectes tels que les frères Victor et Aladár Olgyay ou encore des climatologues comme Helmut Landsberg au cours des années 40-50², ceux-ci ne parvinrent malheureusement pas à la faire devenir la norme en termes de construction neuve. Cela aurait pourtant permis d’éviter, très certainement, un grand nombre de problèmes actuels concernant le bilan énergétique de nos intérieurs. La seconde technique innovante de cette époque, à savoir la climatisation mécanique, s’est quant à elle très largement répandue et popularisée, avec l’ensemble des effets énergétiques et climatiques néfastes qu’on lui reconnaît aujourd’hui.

« si 80% des foyers limitaient leur consigne de chauffage à 19°C, cela économiserait 12TWH d’électricité, soit l’équivalent de 5 réacteurs nucléaires sur l’hiver. Et les gisements d’économie d’électricité sont aussi importants pour les usages d’eau chaude sanitaire (12 TWh) et électrodomestiques (20 TWh). »

De plus, à cette relecture historique des techniques, il apparaît que les choix portés au mobilier et à l’organisation de nos intérieurs, questionnent déjà de longue date sur leur possible rôle concernant la maîtrise de nos climats intérieurs. Les problématiques de l’acoustique, de la lumière et de la thermique, sont par exemple, de tout temps, restées des enjeux primordiaux dans le développement de la pensée et de la pratique de certains architectes ; en arrière-fond des concepts plus formels instillés par l’architecture moderne. De Reyner Banham³ à Philippe Rahm, une autre vision de l’architecture s’est développée. Une pratique architecturale plus technique mais aussi, plus attentive aux environnements au sein desquels elle s’inscrit, de sorte à anticiper les flux et les réseaux invisibles des bâtiments dès leur phase d’élaboration. Mais comment faire alors, avec le bâti existant ? Quelles nouvelles techniques ou solutions environnementales pourraient être mises en place afin de le chauffer à moindre coût énergétique ? 

Pourcentage des surfaces climatisées dans les différents secteurs tertiaires

◁ ³

BANHAM Reyner (1973) The Architecture of the Well-tempered Environment, University of Chicago Press

Se chauffer au travail

Travail et chauffage forme un binôme d’associés, en tout temps et toujours autant d’actualité ! D’autant plus, à en croire les chiffres de la répartition de l’immobilier par secteur. À lui seul, l’immobilier tertiaire représenterait presque la moitié de la surface totale de planchers pour une ville comme Paris (45% pour être exact, soit pas moins de 59 millions de m²). Les lieux de travail, présents en grande proportion à l’échelle d’un territoire, représentent de plus les éléments architecturaux les plus occupés au cours d’une journée et donc les plus demandeurs en chauffage et en énergie. En effet, contrairement aux habitations qui sont les lieux de règne du sommeil, nécessitant une température limitée (dans le temps ou en degrés), les espaces de travail demandent une régulation plus spécifique de leur température, et cela sur des temps relativement longs. Les actifs qui occupent ces espaces des heures durant, ne rentrant chez eux qu’en soirée, certains même seulement pour le coucher (que ce soit le travail qui les ait retenus ou bien divers loisirs), perçoivent comme une nécessité vitale, la possibilité d’adapter la température de leur environnement à leurs propres besoins.

C’est pourtant tout l’inverse qui s’est produit. Dans l’architecture tertiaire, le chauffage se régule le plus souvent à l’échelle d’un plateau, voire sur l’ensemble du bâtiment et la climatisation est devenue la norme, de telle sorte que le climat intérieur s’est vu uniformisé par des machines. Inventée par Willis Carrier dès 1902 pour répondre, à l’origine, à un problème de qualité d’air au sein d’une imprimerie, la climatisation moderne -cette machine à humidifier l’air par évaporation d’eau ou à dessécher de l’air par refroidissement-, a de nos jours pris une telle ampleur qu’elle est responsable de près de 5% des rejets de gaz à effet de serre au sein du secteur du bâtiment. D’après un rapport sur l’usage de la climatisation en France en 2020, au sein du secteur tertiaire, les bureaux représenteraient un taux d’équipements en clim de 64% contre, par exemple, 7% dans les bâtiments d’enseignements. Un taux de plus, en augmentation constante en réaction aux épisodes caniculaires plus forts chaque année, auxquels participent paradoxalement ces équipements par leur importante consommation d’électricité et l’échauffement produit à l’extérieur des habitations par leur rejet, c’est-à-dire dans nos villes.

Le confort thermique individualisé sur le lieu de travail est toutefois une donnée à ne pas sous-estimer puisque comme cela a été démontré, la qualité thermique d’un espace de travail fait partie des facteurs influant sur la créativité des collaborateurs⁴. Or la démocratisation du travail dit de bureau et de modèles d’organisations de plus en plus ouverts de types open-space, va a contrario de cette possible régulation thermique individualisée. En s’ouvrant et en s’enorgueillissant de toujours plus de mètres carrés, les espaces de bureaux requièrent aussi bien davantage de moyens et d’énergie pour optimiser leur température ; la simple chaleur produite par les corps des occupants ne suffisant plus. Ainsi, au-delà des solutions techniques qui pourraient être proposées, ce sont davantage les manières d’occuper ces espaces qui nécessitent une révision et, plus pragmatiquement, ce sont les agencements intérieurs ainsi que leurs usages qui demandent à être réinvestis.

Pour que des évolutions se génèrent, que notre vision se régénère et que des solutions technico-culturelles voient le jour, que faire ? D’une part, certainement s’inspirer de différents procédés élaborés depuis des décennies, ainsi qu’à certains modes de vie plus “climatiques” afin d’inventer des solutions combinatoires adaptées à notre modernité. Le chercheur Michael Humphreys milite, par exemple, pour que des systèmes hybrides se popularisent, de sorte à ce que soient couplées à nos appareils modernes d’anciennes manières de se chauffer/refroidir, moins énergivores⁵. D’autre part, tirer parti des apports récents d’études menées sur l’importance de la perception et de l’ambiance quant au ressenti thermique. Des théories pour lesquelles, l’architecture intérieure semble toute désignée pour les tester et les mettre en pratique. En se focalisant davantage à l’échelle d’un espace intérieur, d’une pièce ou d’un corps, l’architecture intérieure à le mérite de donner à chauffer autrement les espaces de travail, en s’attachant à créer et à réguler des microclimats. Des solutions les plus simplistes demandant peu de réagencement, à celles plus ambitieuses de réorganisation spatiale, différents scénarios peuvent être imaginés pour apporter confort thermique et réduction de l’empreinte carbone.

Chaise à dossier haut et paravent au coin du feu, 1895, illustration issue d’un catalogue de tendances

Scénario n°1 – le chauffage du corps

En partant d’anciens procédés de chauffe tels que les Kotatsu japonais (ces tables basses recouvertes d’un futon emprisonnant une source de chaleur, et sous lesquelles glisser ses jambes au cours d’un repas), des dispositifs low-techs simples peuvent être imaginés à l’échelle d’un bureau. Par exemple, ce même procédé pourrait prendre place à chaque bureau, en enfermant la tour d’ordinateur ainsi que l’ensemble du bureau (le mobilier) d’un textile thermique, afin que cet appareil électrique fasse profiter de ses dégagements de chaleur aux jambes des collaborateurs. Et puisque, la source principale de ressenti d’inconfort est due aux pertes de chaleur de notre propre organisme par rayonnement, la démocratisation de l’usage des bouillottes pourrait accompagner cette nouvelle manière de se réchauffer. Des mobiliers spécifiques pourraient ainsi être imaginés ou bien simplement des accessoires, tels que des housses pour dossier de chaises proposant un réceptacle à bouillotte au niveau du dos. Ou bien encore, des chaises ‘cocooning’ plus englobantes, à l’image des fauteuils carrosse de l’époque Baroque ou Louis XVI, pourraient être réinvestis et ainsi, offrir une partielle isolation phonique -cela étant souvent recherché en open-space- cumulée à une isolation thermique, en formant un mobilier stockant la chaleur produite par le propre corps de l’occupant. Le choix des matériaux jouera dans ce scénario un rôle important afin de maximiser la conservation de la chaleur ; une qualité thermique des matériaux qui a trait à l’effusivité thermique.

L’effusivité thermique caractérise la sensation de chaud ou de froid transmise par un matériau. Plus sa valeur est faible, moins vite la chaleur reçue sera absorbée au cœur du matériau et plus le matériau sera ressenti comme chaud en surface. À l’inverse, si l’effusivité d’un matériau est forte, la chaleur reçue par rayonnement sera rapidement absorbée par le matériau et celui-ci paraîtra frais au toucher. Dans le cas d’une faible effusivité, la captation de la chaleur provoque en retour un rayonnement important, ce qui génère un ressenti de confort. Afin d’être dans les meilleures conditions de travail possible, notamment en hiver, ce type de confort sera donc permis par un choix adapté des matériaux au sein de l’espace. En s’appuyant sur cette qualité d’effusivité thermique des matériaux, ainsi que sur celle de l’ambiance physique d’un espace, diverses solutions de design interdisciplinaire peuvent être mises en œuvre pour chauffer des micro-environnements au travail. L’ambiance physique d’un espace est entendue comme un ensemble de données physiques telles que thermiques, phoniques et lumineuses, à même de jouer sur notre ressenti, sur notre perception de l’espace occupé.

Un kotatsu à l’époque d’Edo
Scénario n°1 :
1 – user de textiles thermiques pour chauffer le corps,
2 – utiliser de bouillottes
3 – déployer des mobiliers qui puissent stocker la chaleur,
4 – s’inspirer des kotatsu pour emprisonner la chaleur des équipements électroniques.

Scénario n°2 – le chauffage par la perception

Un travail sur la perception de l’espace de travail, occupé pendant de longues heures au cours de l’activité professionnelle, pourrait ainsi prendre forme de différentes manières mais se devrait, en toute circonstance, de tirer profit à bon escient de son environnement. Des panneaux séparateurs mobiles et réflecteurs de lumière pourront, par exemple, être installés de sorte à apporter davantage de luminosité. En étant mobilisés à divers endroits au cours de la journée, en fonction du mouvement du soleil, ceux-ci procureront une impression de chaleur. De plus, tout comme il est reconnu que l’usage des couleurs peut avoir un impact sur le ressenti perceptif comme réel d’un espace, le choix des matériaux peut susciter non seulement, une sensation d’ambiance plus chaleureuse mais surtout -dans la visée qui est la nôtre- un ressenti physique réel plus chaud grâce au phénomène d’effusivité précédemment présenté. Ainsi, s’il vaut mieux opter pour un plateau de bureau en bois plutôt qu’en verre, couvrir tout ou une partie de son mur de liège, permettrait de garder davantage la chaleur sans avoir à consommer plus de pétrole. La nature et la couleur des surfaces exposées au soleil sont aussi capitales, en ce sens, que le rayonnement solaire de celles-ci sera complètement différent en fonction de leur choix et donc à même de produire des microclimats spécifiques variables. En plus de cela, la mise en place de rideaux peut aussi avoir un impact important, aussi bien thermique que phonique par le choix d’un textile adapté tout en permettant une transformation simple de l’espace en fonction des besoins ou des saisons.

Lorsqu’il s’agit de réfléchir au meilleur aménagement d’un espace en termes de confort thermique, les déperditions thermiques existantes entre un espace intérieur et l’air extérieur ne sont pas non plus à négliger. Si le choix des matériaux importe lors de la construction même du bâtiment pour permettre une réduction de ces pertes, les trois principes que sont la répartition, l’orientation et la proportion des pièces, sont des données toutes aussi essentielles quand on cherche à se chauffer. Et puisque, seul dans le cas d’une construction nouvelle, ces principes peuvent être réellement bien exploités (en bâtissant de sorte à tirer profit de l’environnement extérieur grâce, par exemple, à une étude sur site de l’ensoleillement), quand l’architecture est déjà existante, il est tout de même possible d’adapter ces procédés pour supporter le froid de l’hiver. Effectivement, il est tout à fait possible d’imaginer des aménagements réversibles ou mobiles, ou bien encore des dispositifs pour permettre une diminution des zones à chauffer au sein d’un bâtiment existant. Pour cela, l’architecture intérieure et le design apparaissent comme d’importantes ressources, à même notamment d’optimiser un système de chauffage par strates.

Scénario n°2 :
1 – utiliser des rideaux pour diminuer l’espace à maintenir au chaud,
2 – déployer des cloisonnettes pour limiter les déperditions thermiques et la sensation de fraicheur provoquée par des courants d’air,

3 – user de matériaux à faible effusivité thermique pour produire une sensation de chaleur.

Scénario n°3 – le chauffage par strates thermiques

Relatif au concept d’architecture que Philippe Rahm nomme météorologique ou climatique, les fermes comtoises du 18ᵉ siècle, représentent un exemple très parlant d’une bonne exploitation de l’espace ou des “strates atmosphériques” de celui-ci, en fonction des saisons. Afin de se protéger de la dureté du climat franc-comtois, le choix des matériaux et la conception d’architectures monoblocs au sein desquelles humains et animaux cohabitaient, permirent d’offrir aux occupants de ces fermes un certain confort thermique en hiver, à moindre frais énergétique. L’étable dans laquelle les vaches étaient cantonnées durant la saison froide, était ainsi contigüe de la partie habitation, ce qui permettait aux habitants de profiter de la chaleur naturellement produite par les bêtes. De plus, l’installation d’une grange dans les combles, dans laquelle le fourrage était stocké l’hiver, permettait d’offrir un isolant thermique de qualité. En combinant à l’organisation du travail saisonnier, des principes architecturaux judicieux, ces anciennes fermes comtoises montrent un bel exemple de gestion raisonnée de chauffage, au sein d’un espace à la fois d’habitation et de travail. Mais puisqu’à notre époque, s’approprier tel quel de pareils procédés de chauffage paraît quelque peu suranné, tout l’enjeu réside dans la réadaptation de ces préceptes à l’aune de nos modes de vie contemporains.

À défaut de pouvoir profiter de la chaleur naturelle d’autres espèces, prendre en considération le principe de la convection (chauffage de l’air) -qui fait partie des trois procédés techniques majeurs pour se chauffer/refroidir avec la conduction (chauffage par contact physique) et la radiation (chauffage via les ondes électromagnétiques)⁶- peut déjà offrir de nouvelles pistes de réflexions. Comme Rahm l’a récemment rappelé au cours d’une conférence sur le climat au Centre Pompidou, le principe de la convection produit un phénomène atmosphérique qui conduit à ce que l’air chaud, à la densité plus faible, monte dans un espace donné. La chaleur se retrouve donc concentrée sous nos plafonds alors que nous passons le plus clair de notre temps au niveau du plancher. Si ce phénomène de convection l’a ainsi amené à imaginer des aménagements par strates, amenant à vivre à différentes hauteurs en fonction des saisons au sein de nos habitations, appliquer ce précepte à l’espace professionnel semble quelque peu plus périlleux. Même si pour la période hivernale plus fraîche, concevoir un dispositif permettant de percher en hauteur au plus proche du plafond nos équipements de bureaux, telles des chaises d’arbitre sur un court de tennis, n’est dénué ni d’intérêt ni de fantaisie, une stratification de l’espace sur la largeur semble plus facile à exécuter.

Le phénomène de convection : l’air chaud moins dense monte

À l’instar des préconisations schématiques dont regorgeait déjà l’ouvrage Alternatives énergétiques de Yona Friedman en 2011, penser un aménagement de sorte à pouvoir installer un sas (un espace tampon) entre l’air extérieur et l’espace intérieur, permettrait par exemple, de limiter les déperditions thermiques en cours au niveau des parois. Ainsi, installer des placards muraux tout le long de la paroi donnant sur l’extérieur (sans pour autant bannir la probable fenêtre qui perce celle-ci) permettrait de gagner en confort thermique, tout aussi bien en hiver qu’en été. Concevoir un aménagement réversible peut aussi apparaître comme judicieux, afin de tirer profit de l’ensoleillement du bâtiment aux différentes saisons de l’année ou pour s’adapter plus simplement aux différences de ressenti thermique des occupants. Grâce à la mise en place d’un mobilier sur roulettes permettant de déplacer aisément son équipement en fonction de la température ressentie ou recherchée, une occupation de manière saisonnière pourrait être soutenue au sein des bureaux. Si le déplacement des zones occupées et donc à chauffer au cours de l’année est une possibilité, la diminution de ces zones pourrait être une autre alternative facile à développer grâce au design d’un mobilier cloisonnant. En créant de plus petits environnements à chauffer au cours de l’hiver ou de périodes fraîches, au sein même de l’infrastructure globale, l’architecture intérieure est à même de répondre aux besoins de confort thermique des collaborateurs ainsi qu’à la réduction indispensable de notre dépendance aux énergies fossiles.

Scénario n°3 : réaménager l’espace en fonction des saisons

L’architecture intérieure à la rescousse d’un chauffage bas carbone

Face à l’objectif bien défini d’une neutralité carbone à l’horizon 2050, décrété par le gouvernement français dès février 2020 lors de l’annonce de la nouvelle stratégie nationale bas-carbone (SNBC), les solutions pour y parvenir dans le secteur du bâtiment, sont apparues quant à elles bien plus floues dans leur définition. Robin Girard, dans un court article sur de possibles modes de chauffage bas-carbone⁷, s’est fait le relais de ce que beaucoup pensent, à savoir que la SNBC manque d’une description détaillée des leviers à actionner. Et si la réflexion portée par celui-ci reste instructive, quant à l’alternative énergétique la moins destructrice au vu des différents modes de chauffages existants, elle paraît quelque peu hors-propos tant le débat qui demande à émerger aujourd’hui, semble plus encore culturel que technique. En effet, pour abandonner les formes architecturales héritées du 20ᵉ siècle et du modèle tout pétrole, c’est une transformation globale de notre manière de nous chauffer et donc d’habiter qui doit advenir. Pour que, de célestes, les solutions contre l’urgence climatique deviennent plus palpables et terrestres, un changement de perception et d’échelle semble nécessaire. Pour rapporter ce défi gigantesque à grandeur d’homme, s’en saisir par le biais de l’architecture intérieure et du design laisse entrevoir des solutions ingénieusement plus sobres et efficientes à plus court terme. Rationalisation de l’espace réel à chauffer, nouvelle organisation climatique de l’espace, traitement d’ambiances et d’atmosphères, réactualisation d’anciens dispositifs de régulation de la température, sont autant d’éléments à même d’influencer nos modes de vie, qu’il nous importait de questionner et qui nous l’espérons, seront investis. 

Pour conclure, nous estimons que pour faire preuve de sagacité quant à nos modes de chauffage (tout comme de rafraîchissement), les repenser de manière plus contextualisée, les concevoir aux ordres de grandeur du micro-climat ou du micro-environnement, paraît pouvoir apporter des solutions davantage adaptées à la pluralité des situations, des climats, des besoins ainsi qu’au respect de la planète. Comme l’exhorte Clément Gaillard dans un article traitant du cas de l’opposition existante entre les techniques solaires passives et actives en architecture, pour se chauffer/refroidir autrement le renouvellement des mentalités techniques s’avèrera indispensable.